Les dunes oiseuses aux teints de fauve s’enchevêtrent indéfiniment à l’horizon, vagues et nébuleuses sous l’impétuosité de l’astre embrasé régissant le désert d’Ira. Silencieux, cette quiétude, mortellement relaxante, n’est qu’ébranlée par les sabots puissants d’un Kahazar à la robe basanée, au crin de jais et aux iris fervents, concentrés sur le gibier qu’il talonne avec zèle. Son cavalier, lui, voilé d’une étoffe effilochée et poudreuse, sa longue chevelure d’ébène aux mèches pourpres frôlant sa robuste nuque, demeure droit et ferme, claquant ses étriers contre les flancs de la monture.

La bête, traquée, apeurée, malhabile s’entortille dans le sable aux nuances safranées et chute aux pieds de ses braconniers, harassée d’une telle course. Cependant, la compassion n’est pas chose dont il a coutume. Extrayant une flèche effilée de son carquois de cuir, l’arquant avec minutie, la créature miséreuse la contemple percer sa propre trachée, le sang incarnat ruisselant en larmes déliées sur sa poitrine. L’homme occulte, alors, meurtrier à la prestance intouchable, s’incline publiquement face à son funèbre homicide. Fermant ses lourdes paupières, il susurre un discourt funeste, une prompt prière, psalmodié d’une voix rauque et drastique :

« Que la bénédiction de Pyrhas accompagne ton corps dans son retour à la terre. Que Pyrhas ramène ton esprit dans les bras de la Mère de Tous. Là, tu reposeras en paix. Que les Portes te soient ouvertes. »

Tandis que son regard épouse le couchant, qu’un voile amarrant pavoise les terres ingrates de son exile, il extrait à coup de dague le cœur encore palpitant, sanglant, du martyr de sa traque. Cela vaudra de l’or, se dit-il, bien qu’infime, assez pour subsister l’Wëynae venue.

Cette vie d’errance, d’isolement, et d’escroquerie… Il l’a élit, et ne la déplore guère. Il a su trouver l’attrait de ce lieu délétère, où les dépouilles érigent les monticules sablonneux et où les pleutres crèvent à la pelle. Là où l’odeur barbare de la mort, qu’il hume à plein poumon, macule ses vêtements de vermeil. Là où les vociférations des spectres, qu’il ouïe des monts, lui insuffle la frénésie.

Cet homme avare et secret, a délaissé sa famille pour se repentir, et se droguer de l’ébriété meurtrière du désert. Et c'est sous ce ciel grenat, qu'il songe...

✘✘✘

- " Le macabre décès de la prêtresse, Elza D. Ondore, fut pour l'ensemble des saints de Valea une terrible tragédie. Âme charitable et mère gardienne de notre temple, elle était le symbole de la compassion. En sa faveur, nous avons élevé nombreux chants de prière. Puisse-t-elle trouver la paix entre les bras de Pyrhas, sous le joug de son royaume immaculé."

(XXXX, Temple de Valea)

- " La prêtresse est morte. Larsa K. Ondore s'est lui aussi sentit coupable, mais n'a jamais décidé de passer le reste de sa vie à se tourmenter pour cela. Il a décidé de devenir Templier, de protéger les futurs prêtres et prêtresses pour éviter qu'un tel drame ne se reproduise."

(XXXX, Sidheim)

- " Suite à cet incident, les regrets ont fini par m'éroder. Notre père me tenez comme responsable de cette funeste infortune pesant désormais sur l'échine de notre noble famille, et ses sermons ne faisaient qu'accroitre le fardeau de mes remords. Implorant le pardon de Pyrhas, priant nuit et jour afin d'expié mon péché, j'ai fini par m'exiler au désert d'Ira, là où la vie n'était qu'éphémère. J'ai appris les prémisses de la chasse et de la survie. J'ai appris à dérober l'or et fabuler les odyssées factices d'un généreux voyageur afin de hausser le prix de mes butins. Et j'ai juré de ne plus regagner ma terre natale avant de m'être lavé de cet outrage... La mort est la meilleure des eaux purificatrices."

(Vayne B. Ondore, Oasis de la Vierge)

✘✘✘